“Neuchâtelois extraordinaires”
Considérée comme une sorcière, à son arrivée dans le Val de Travers, il y a plus de trente ans, voilà Tomi Tomek saluée aujourd’hui comme une neuchâteloise extraordinaire. Cherchez l’erreur ! La dame a du caractère et lorsque elle s’engage pour une cause, elle fonce. Elle a donc, bien entendu, donné autrefois de la voix et peut-être de la griffe. Avec les années, elle a pris de l’expérience, retrouvé son calme nordique et sait jouir désormais d’une certaine sérénité, sans perdre de vue les objectifs de SOS CHATS à Noiraigue. L’injustice, la misère, la ségrégation, tout cela l’insupporte
A Berlin où elle a étudié la pédagogie mais aussi le mime, elle a longuement travaillé avec des enfants qu’on appelait autrefois caractériels. En 1974, elle fonde, toujours à Berlin la première maison pour femmes battues. C’est son goût du théâtre qui l’attire en Suisse, elle cherche à jouer, s’approche du cinéma. Mais son destin la mène par le bout du nez au bord de la réserve du Creux du Van dans une maison disponible et assez vaste pour abriter ses projets. Naturellement, instinctivement, sans réfléchir, elle recueille quelques chats, la rumeur se répand comme des touffes de poils et les téléphones commencent de crépiter. Le refuge est en train de naître.
Comme Tomi Tomek ne peut pas sauver tout le monde ni tout les chats, elle a appris à dire non. Mais cela lui a pris beaucoup de temps d’oser installer un répondeur téléphonique ou de s’accorder un peu de repos le samedi ou le dimanche. Lorsque le refuge a pris de l’ampleur (jusqu’à 328 chats) Tomi Tomek et sa compagne Élisabeth ont cherché de l’aide pratique et ont accueilli quelques personnes atypiques. Elles offraient un toit, une activité saine et une ambiance familiale. Mais les chats maltraités ont besoin d’équilibre, de constance et de calme et ces deux marginalités-là n’étaient pas compatibles. C’est pourquoi aujourd’hui Tomi Tomek s’est entourée d’une équipe de bénévoles fiables motivés et engagés pour assurer le travail quotidien au refuge : soigner, nourrir, nettoyer et être en lien patient avec les chats. Et pour cette meneuse qui n’a pas pris congé depuis longtemps, cela deviendrait presque possible, car le relais est assuré.
Si l’injustice peut parfois transformer Tomi Tomek en pasionaria, sa relation au chat est paradoxalement raisonnable. Elle aime les chats comme elle aime toute vie, mais ne les adorent pas. Elle aime bien entendu la douceur du poil, le ronronnement qui fait du bien. Et dans son habitat presque entièrement dévolu aux chats, elle aime les observer et partager leur vie. Ils la font rire mais ils l’agacent également et elle ne trouve en eux rien de mystique.
Comme son père d’origine roumaine travaillait sur le comportement des chiens dans son enfance, elle a certainement développé une sorte d’instinct pour l’animal. Elle a surtout la patience et la retenue nécessaire. Son but n’est pas de posséder, maîtriser, toucher l’animal. Quand un chat arrive au refuge, elle désire simplement qu’il puisse découvrir une nouvelle vie avec le moins de souffrance possible. Mais elle ne peut effacer son passé et doit l’accepter avec ses traumatismes. D’ailleurs ses capacités dans l’apprivoisement des chats errants ou difficiles sont reconnues et diverses organisations s’adressent désormais à elle dans des situations improbables
S’il n’y avait pas les chats dans la vie de Tomi Tomek ? Alors il y aurait le théâtre, ou bien elle vivrait en Inde et accueillerait les enfants des rues. D’ailleurs, elle soutient personnellement trois orphelinats en Ukraine et des protecteurs des animaux en Roumanie.
La recherche de fonds pour les 130 chats du refuge est une activité constante. L’association va d’ailleurs se transformer bientôt en fondation ce qui devrait lui fournir une meilleure assise. Le projet actuel est d’acheter un camion vétérinaire afin de pouvoir procéder à la stérilisation-castration des chats errants. Respectueuses envers les donateurs, Tomi Tomek veille à ce que chaque centime soit utilisé de la manière la plus adéquate.
Mais dans la vie de Tomi Tomek, l’argent n’est pas essentiel. Elle a trop besoin d’émotions, de relation humaine et de rires. Le plus important pour elle, ce ne sont pas les chats, c’est la vie, quelle que soit la formequ’elle prend. Et ce qu’elle souhaite avant tout c’est d’être en accord avec elle-même le soir en s’endormant.”
Les imbéciles disent chaque fois que quelqu’un soigne des animaux, qu’il vaudrait mieux s’occuper des humains. Tomi Tomek est la preuve vivante que l’un n’empêche pas l’autre. Elle prend soin des femmes battues, des enfants caractériels et… des chats. Il y a les gens qui font rien pour personne et ceux qui savent se dévouer pour les causes.
“Neuchâtelois extraordinaires”
SOS CHATS Noiraigue